Conférence de Dimitri El Murr, maître de conférences en philosophie à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne et membre junior de l’Institut Universitaire de France. Ses recherches portent sur l’histoire de la philosophie antique, notamment sur Socrate, Platon et la réception du platonisme politique dans l’Antiquité et au-delà.

Résumé
C’est dans ses derniers dialogues, et particulièrement dans le Sophiste et le Politique, que Platon prête l’attention la plus soutenue aux questions de méthode soulevées par la recherche dialectique d’une définition. En effet, le Sophiste comme le Politique font un usage de la méthode de division dont l’ampleur est tout à fait singulière dans l’ensemble du corpus platonicum, un usage positif mais également critique, puisque Platon ne cesse dans ces deux dialogues d’examiner les conditions et les limites du processus diairétique. La diairesis n’est pourtant pas le seul aspect de la méthode dialectique que Platon explore en détail. Un autre aspect marque la singularité du Sophiste et du Politique : il s’agit de l’usage des modèles (paradeigmata) ou paradigmes, par quoi il faut entendre la comparaison systématique et détaillée entre deux réalités, la première faisant office de modèle permettant l’élucidation de la seconde.

C’est dans un passage, technique et difficile, du Politique (277 d-279 b) que l’on trouve l’analyse la plus détaillée des conditions de production et d’utilisation d’un modèle, dans le cadre d’une recherche dialectique. Ce passage a déjà fait l’objet d’une littérature conséquente. Un point, pourtant, n’a pas encore reçu toute l’attention critique qu’il mérite. Que Platon ait considéré que l’usage de modèles constituait un instrument important dans la recherche d’une définition ne fait aucun doute, mais il reste à savoir comment, selon lui, la méthode par paradigme opère du point de vue cognitif. Comment la méthode par paradigme analysée en détail dans le Politique s’inscrit-elle dans le cadre plus général de l’épistémologie platonicienne ?